Litiges commerciaux – Puis-je attraire une société américaine devant les tribunaux suisses?
Les tribunaux suisses sont-ils compétents ?
Élection de for
La Suisse et les États-Unis n’ont pas conclu de convention internationale réglant la question du for applicable dans les litiges commerciaux. En effet, les États-Unis ne sont pas partis à la Convention de Lugano. Ainsi, la question est tranchée en Suisse uniquement par la Loi fédérale sur le droit international privé (LDIP). Dans ce cadre, les parties peuvent convenir d’une élection de for, soit le tribunal qui sera appelé a tranché un différend né ou à naître à l’occasion de leurs relations contractuelles (art. 5 al. 1 LDIP). À relever que le demandeur doit apporter la preuve de cette élection par un texte (écrit, télégramme, télex, télécopieur, ou tout autre moyen) (art. 5 al. 2 LDIP). Si une élection de for en Suisse a été prévue, le demandeur pourra alors saisir les tribunaux suisses (art. 5 al. 3 LDIP).
Exemple de Clause
Tous litiges, différends ou prétentions nés du présent contrat ou se rapportant à celui-ci, y compris la validité, la nullité, la violation, ou la résiliation du contrat seront portés devant les tribunaux de [ville/canton], le recours au Tribunal fédéral étant réservé
Sans élection de for
À défaut d’élection de for, les tribunaux suisses seront compétents uniquement si (i) la société américaine saisit les tribunaux suisses contre la société suisse (art. 2 LDIP) ou si (ii) la société américaine procède au fond sans faire de réserve sur la compétence des tribunaux suisses (acceptation tacite) (art. 6 LDIP). Cependant, si la société américaine soulève l’exception d’incompétence ratione loci, la société suisse n’aura pas d’autres options que d’ouvrir une action aux États-Unis (ibid.).
À relever que la Suisse et les États-Unis ont signé une convention prévoyant notamment que les contestations qui pourraient s’élever entre les prétendants à une succession, sur la question de savoir à qui les biens doivent appartenir, doivent impérativement être portées devant les tribunaux et être jugées d’après les lois du pays dans lequel la propriété est située (art. 6 du Traité conclu entre la Confédération suisse et les États-Unis de l’Amérique du Nord, du 25 novembre 1850).
Séquestre
À défaut d’élection de for (ou en cas d’élection de for non exclusive), la société suisse peut utiliser la voie du séquestre pour fonder un for en Suisse (art. 4 LDIP). Pour cela, il faut premièrement obtenir le séquestre des biens du créancier en Suisse. Pour rappel, afin d’éviter la disparition de biens, la loi prévoit la possibilité de faire séquestrer les biens d’un débiteur étranger qui se trouvent en Suisse pour autant que la créance ait un lien suffisant avec la Suisse ou qu’elle se fonde sur une reconnaissance de dette (art. 271 al. 1 let. 3 LP). Le créancier doit alors faire valider le séquestre par une poursuite (art. 279 LP). Si le débiteur fait opposition à la poursuite, le créancier doit ensuite ouvrir une action en paiement (ibid.). Cette action peut a priori être ouverte en Suisse (art. 4 LDIP) (SJ 1998 p. 325).
Conclusion
En résumé, si vous êtes une entreprise suisse et que vous souhaitez pouvoir saisir les tribunaux suisses en cas de litige contre une société américaine, il est hautement recommandé de prévoir une élection de for.